" La création variétale pour pérenniser la pépinière "
Depuis qu'il a repris l'entreprise, Arnaud Delbard, petit-fils du fondateur et PDG actuel des Pépinières et Roseraies Georges Delbard, dans l'Allier, recentre les activités sur le potentiel d'innovation et les atouts relatifs à la couleur, à la fragrance, au goût, à la saveur et à la résistance de ses obtentions.
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Comment rebondir quand votre entreprise a eu des soubresauts économiques et financiers ? À 80 ans, une entité renommée telle que les Pépinières Georges Delbard devrait être sereine mais la vie n'a pas toujours été un long fleuve tranquille, avec plusieurs actionnaires et des rachats successifs.
Pour Arnaud Delbard, petit-fils du fondateur et actuel PDG, le challenge n'est pas mince. À Malicorne (03), au nord de l'Auvergne, il relance depuis mars 2012 les activités sous une nouvelle dénomination et marque de produits : Pépinières et Roseraies Georges Delbard (PRGD). Le nom Delbard reste un atout, associé à la pépinière et au prénom du fondateur. Seul, le nom existe toujours, mais sans aucun lien désormais avec la famille originelle pour les enseignes de jardineries. Au-delà des vicissitudes de statuts juridiques, de noms et de marques commerciales, il a fallu se réorganiser sans le circuit de la distribution spécialisée (les jardineries). « Notre chance est d'avoir pu compter sur notre patrimoine génétique et notre expérience en création variétale. C'est notre valeur ajoutée », assure Arnaud Delbard. « En axant nos recherches sur la saveur et les arômes des fruits, sur les parfums puissants des roses, et plus particulièrement encore sur la résistance aux maladies, nous pouvons conserver la confiance de notre clientèle. Et cette création variétale nous apporte les revenus des différentes licences concédées à travers le monde. Le travail de sélection et les concepts marketing, c'est ce qui nous permet de résister et de nous démarquer de la concurrence. Chaque année, nous réinvestissons environ 10 % du chiffre d'affaires dans ce domaine. » Sachant que l'obtention variétale reste un énorme chantier : en fruitiers, une nouveauté sera obtenue parmi environ 10 000 plants étudiés, et en rosiers, un cultivar vraiment innovant sur 150 000 graines semées...
La sélection variétale étant d'abord affaire de tris drastiques, sur quels critères se basent les décisions ? Pour la création de nouveautés dans les fruitiers, la pépinière connaît de mieux en mieux ses géniteurs, grâce au séquençage du pommier par exemple. C'est important pour gagner du temps et avancer sur les critères comme la résistance à la tavelure. Sachant qu'il faut de 4 à 5 ans pour déguster le premier fruit, et une vingtaine d'années pour commercialiser une nouvelle variété.
Sur rosiers (où il faut de 4 à 7 ans entre la première fleur et la commercialisation), l'amélioration de cultivars ou la création d'innovations est davantage une affaire de combinaisons. Par exemple, pour sortir un couvre-sol, il faut tenir compte de son port, de son envergure, de sa résistance au climat, de son aspect esthétique... Pour une plante destinée aux potées fleuries, on tiendra compte de la compacité. Pour le jardin, la résistance aux maladies est importante. Pour le jardin et la fleur coupée, on recherche du parfum (dans chaque coloris). Pour cette dernière, il faut aussi de la productivité, une belle taille de bouton et une bonne tenue sur la durée. Or la résistance, la fragrance et la tenue en vase sont trois facteurs rarement bien associés génétiquement. Quel que soit le type recherché, et quels que soient les atouts visuels, le critère relatif à la facilité de culture (critères agronomiques) reste éliminatoire s'il n'est pas garanti par les contrôles finaux.
Mais que seraient les nouveautés de rosiers sans leurs parrains et marraines, tous célèbres ? C'est important, particulièrement en roses, pour la notoriété. « Mais cela n'a aucun intérêt si le cultivar n'est pas de qualité intrinsèque », assure Arnaud Delbard. La forte tendance marketing actuelle va aux dénominations qui portent un vrai message citoyen, pour conforter l'image d'entreprise citoyenne. « Là, c'est la cause défendue qui est la star ; mais il faut que les cultivars retenus soient vraiment exceptionnels. C'est le cas d'Amnesty International®, un grimpant dont 1 euro de la vente est reversé à l'association éponyme pour chaque plant commercialisé. Ce rosier vient enrichir la collection des Roses du coeur comme Soleil du Monde® ou Soeur Emmanuelle®. »
Un travail se poursuit également depuis plus de 20 ans pour le dahlia de jardin, et depuis 2006 pour le programme dédié aux potées, avec un partenaire, Jeanne de Laval, à Beaufort-en-Vallée (49). Les pépinières Delbard participent à la démarche concernant trois Label rouge horticoles pour la promotion de la qualité. C'est concret pour les dahlias, avec déjà deux années de récompenses et de communication. C'est aussi en bonne voie pour les rosiers : le cahier des charges, les jurys pro et amateur, les tests sont effectifs et les enseignes commerciales sont partantes. Reste à gérer une bonne mise en vente et les contrôles. La démarche débute pour les fruitiers. À cette fin, une section de fruitiers a été créée au sein d'Excellence végétale, et un verger est en cours de plantation (avec comparaison de plantes témoin et plantes à juger) tout près de la pépinière, à Commentry (03). Le cahier des charges a été travaillé mais il faudra plus de temps pour qu'il aboutisse, vu le cycle de croissance lent des arbres à fruits.
Aujourd'hui, les enjeux pour la pépinière portent notamment sur le développement d'une gamme de fruitiers destinés aux balcons et aux terrasses initiée depuis une quinzaine d'années, mais aussi, depuis un an et demi, sur la réduction du désherbage. La pépinière est déjà en zéro traitement antigerminatif, ce qui implique de redévelopper le désherbage et le binage mécanique. La qualité des plantes s'en trouve visiblement améliorée. Quant à aller sur le bio, « c'est envisageable, si et seulement si il est possible d'engager des partenariats sur le long terme, car les investissements sont tout autres », assure Arnaud Delbard.
Pour ses 80 ans en 2015, l'entreprise s'est offert un jardin événementiel retraçant son existence, aux Journées des plantes de Courson, mi-mai, à Chantilly (60), ainsi qu'un baptême, fin mai à Lyon (69), pour sa rose Only Lyon®, destinée aux fleuristes, et un autre baptême, début juin à Jardins, Jardin, à Paris, pour son rosier grimpant Amnesty International®.
Début novembre, la pépinière a proposé à ses clients deux journées de rencontre et de formation pour soigner, former et faire fructifier avec encore plus de succès les rosiers et les fruitiers, jeunes et anciens.
Odile Maillard
La serre aux rosiers rassemble les lignées parentales. Parmi les critères de sélection, Arnaud Delbard prête une attention particulière aux parfums, sans oublier la résistance aux maladies.
Les commandes de petits fruits sont préparées en conteneurs de 2 litres rond carré.
La pépinière Georges Delbard développe depuis une quinzaine d'années une gamme d'arbres fruitiers destinés aux balcons et aux terrasses en très gros pots. Ici, la variété 'Villandry'.
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